Polémique pédagogique : Leadership et formation en ligne font-ils chambre à part?

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By Louis Auger
5 min
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Avez-vous déjà suivi une formation en ligne sur le leadership? Une de ces capsules de 30 minutes qui présente des notions clé et des scénarios décisionnels comme celui-ci?

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Pour les concepteurs de formation, ce genre de projet représente un défi, spécialement en ce qui concerne les scénarios. L’enjeu est de choisir des situations pertinentes, assez simples pour être succinctes, mais suffisamment complexes pour que le défi ne semble pas réducteur. En conséquence, les résultats de ces formations sont souvent inégaux. Les participants les apprécient, mais l’apprentissage est-il significatif? Y a-t-il vraiment un impact sur le travail?

Dans cet article, nous verrons pourquoi les connaissances comportementales en général, et le leadership en particulier, résistent aux formes traditionnelles du eLearning, surtout sur le plan des scénarios pratiques. Nous verrons aussi comment les outils de post-formation comme B12 aident à contourner ces difficultés. 

Le problème : environnement « kind » ou « wicked »?

Dans son livre Educating Intuition, l’économiste Robin Hogarth introduit une distinction importante entre les environnements de formation « kind » (gentils) et « wicked » (méchants).

Pour Hogarth, les environnements « kind » se caractérisent par des patterns constants, qui se répètent et obéissent à des règles strictes. Pensez au jeu des échecs : quelle que soit la situation qu’on rencontre, les règles sont bien définies, nous avons accès à toute l’information pertinente, et la rétroaction après une action est immédiate, fiable et intelligible.

En contexte de travail, l’utilisation d’un logiciel et les procédures de santé et sécurité constituent des environnements « kind ».

À l’autre opposé du spectre, on retrouve les environnements « wicked », où les patterns sont inconstants et les règles, partielles ou obscures. Face à un problème, une part de l’information est manquante, et la rétroaction après une action est retardée, incomplète, ou nous induit carrément en erreur.

De bons exemples d’environnements « wicked » sont la médecine, la résolution de problème et… le leadership.

Revenons un instant au scénario décisionnel qui coiffe cet article. Dans ce tableau, nous analysons la complexité du scénario en évaluant l’écart entre celui-ci et une situation semblable qui se présenterait au travail.

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Comme on le constate, le scénario se base sur une situation qui, en réalité, contient des variables imprévisibles (inconstance des patterns sociaux, information manquante, rétroaction peut-être trompeuse). Et pourtant, l’activité fait largement fi de cette complexité. Cela est bien sûr dû à des limitations techniques : il est très difficile, sinon impossible, de refléter la richesse d’une interaction sociale par le biais d’un scénario décisionnel. Pour que l’activité fonctionne, on doit opérer une simplification vertigineuse, de sorte que les patterns deviennent clairs, que les comportements soient prévisibles, et que la rétroaction n’induise pas en erreur.

En d’autres termes, on doit transformer un problème « wicked » en une question « kind ». Mais ce faisant, on se détourne des plus grands défis du poste de gestionnaire.

Par ailleurs, on retrouve dans le scénario décisionnel un sous-texte dérangeant, à savoir que l’information immédiatement accessible est suffisante pour résoudre un problème complexe. Il s’agit d’un piège cognitif nommé : “What you see is all there is”, ou WYSIATI (« Ce que tu vois est tout ce qu’il y a »). Dans notre exemple, la question cautionne ce réflexe en demandant à l’apprenant de réagir sans creuser davantage. Or, la résolution de problèmes complexes, et la performance au sein d’environnements « wicked » en général, implique justement d’éviter le piège du WYSIATI et d’aller en quête de l’information manquante avant de prendre une décision.

Compenser le problème

En dépit des enjeux soulevés ici, il demeure de nombreux bienfaits aux capsules eLearning sur le leadership et les connaissances comportementales. D’abord, ces formations contiennent souvent des présentations théoriques qui aiguisent le jugement. Les scénarios décisionnels peuvent aussi engendrer une réflexion plus profonde que l’exercice en soi, en plus de servir aux apprenants un avertissement parlant : « Soyez prêt! Vous ferez face à ce genre de situation un jour! »

Pour stimuler davantage cette réflexion, une bonne stratégie consiste à remplacer le choix multiple par une question ouverte sans réponses préprogrammées. 

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L’apprenant peut ainsi réfléchir à sa guise avant de comparer sa réponse à celle d’un expert. Cette approche suppose bien sûr que l’apprenant se livre à la réflexion proposée plutôt que de faire défiler rapidement les pages. Or, le jeu en vaut la chandelle, car, en évitant la simplification imposée par les choix prédéfinis, cette approche rend mieux justice à la complexité des problèmes « wicked ».

Le rôle de la post-formation

Même dans les meilleures formations sur les connaissances comportementales, l’écart avec la réalité du travail est grand. Plusieurs le comblent à l’aide de coaching personnalisé, ou de rencontres/webinaires où tous partagent leurs expériences. Ces mesures sont efficaces, surtout lorsqu’accompagnées d’un plan de développement et de suivis réguliers.

Dans ce contexte, les plateformes qui, comme B12, supportent les activités de post-formation sont fort intéressantes. En plus d’héberger des contenus eLearning, ces plateformes offrent des fonctionnalités qui accélèrent le transfert des connaissances, de sorte que les notions apprises en ligne soient utilisées au travail, là où les habiletés comportementales s’articulent dans leur pleine complexité.

À titre d’exemple, B12 permet d’inclure des activités à réaliser au travail dans les semaines ou mois suivant une formation (adresser une plainte, résoudre un conflit, effectuer une entrevue d’embauche, etc.). La performance de l’apprenant est alors évaluée par un pair, un superviseur ou l’apprenant lui-même. On peut ensuite mesurer le sentiment d’efficacité personnelle en sondant l’apprenant sur son niveau de confiance envers la tâche. Les résultats peuvent être consultés par l’apprenant, les gestionnaires et les formateurs, par le biais de tableaux de bord conçus sur mesure selon les indicateurs de performance de l’organisation.

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Mais l’avantage principal d’un outil comme B12 est celui de la réactivité. Car, pour chaque écart de performance relevé dans les tableaux de bord, les formateurs peuvent réagir en déployant, en quelques minutes seulement, des activités de renforcement additionnelles. Il peut s’agir d’exercices pratiques, de webinaires, de rencontres individuelles, de contenus multimédias (textes, vidéo, quiz), et même de scénarios décisionnels à faire en ligne. Nous avons vu que ceux-ci ne sont pas exempts de limites, mais, lorsqu’on cible des problèmes de performance bien circonscrits, toutes les activités prennent du galon, aussi imparfaites soient-elles!

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